«Un Français, un Anglais, un Allemand furent chargés d’une
étude sur le chameau.
Le Français alla au jardin des Plantes, y passa une
demi-heure, interrogea le gardien, jeta du pain au chameau, le taquina avec le
bout de son parapluie, et, rentré chez lui, écrivit, pour son journal, un
feuilleton plein d’aperçus piquants et spirituels.
L’Anglais, emportant son panier à thé et un confortable materiel de campement,
alla planter sa tente dans les pays d’Orient, et en rapporta, après un séjour
de deux ou trois ans, un gros volume bourré de faits sans ordre ni conclusion,
mais d’une réelle valeur documentaire.
Quant à l’Allemand, plein de mépris pour la frivolité du
Français et l’absence d’idées générales de l’Anglais, il s’enferma dans sa
chambre pour y rédiger un ouvrage en plusieurs volumes, intitulé: Idée du chameau tiré de la conception du moi».
Le Pèlerin, 1-er septembre 1929, cf. Luc Ferry, Alain Renaut
– La pensée 68. Essai sur
l’anti-humanisme contemporain, Éditions Gallimard, 1988.
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